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Espérant à ce signe une fois reconnaître
Dans l’homme enfin grandi l’enfant qu’elle fit naître !


» Sans qu’aucun œil comprît ce signe sur ma peau,
Je grandis confondu dans le jeune troupeau,
Exerçant du palais les serviles offices,
Façonné par les dieux aux sanglants exercices,
Instruit par leur exemple à fouler les humaines,
Allumant dans leurs tours leurs foudres de mes mains,
Surpassant mes rivaux, et bientôt dieu moi-même.
Cependant je ne sais quelle horreur du blasphème,
Soit que ce fût l’effet de ce nom du Seigneur
Que ma mère avait mis comme un sceau sur mon cœur,
Soit que le sang plus doux d’une plus sainte race
En moi de ses vertus eût laissé quelque trace,
Rendait ce ministère exécrable à mes yeux.
Tout en les adorant, je haïssais les dieux ;
Et disciple chéri, mais disciple farouche,
Je vomissais du cœur ce qu’enseignait leur bouche !


» Un jour qu’atteint du fer dans un de ces combats
Que les hommes d’en haut livraient à ceux d’en bas,
Je gisais dans mon sang, et que l’oiseau de proie
Tournoyant sur mon corps criait déjà de joie ;
Qu’en passant près de moi des hommes sans pitié
De leurs pieds retournaient mon corps mort à moitié ;
Une femme parut sur le champ de batailles.
Oh ! celle qui porta l’homme dans ses entrailles,