Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/283

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Obélisques taillés dans un bloc seulement,
Arrachés de la terre ainsi qu’un ossement,
Et sans rien supporter s’amincissant en glaive,
Dans le ciel étonné se perdant comme un rêve !
Aqueducs où grondait le fleuve aux grandes eaux,
Jardins aériens portés sur mille arceaux,
Dont les arbres géants, plus hauts que nos idées,
Jetaient sur les palais l’ombre de cent coudées !
Colonnades suivant, comme un serpent d’airain,
Des coteaux aux vallons les grands plis de terrain,
Où des troncs de métal, prodigieuses plantes,
Portaient à leurs sommets des feuillages d’acanthes ;
Des vases où fumaient des bûchers d’aloès
Pour embaumer, la nuit, la brise des palais,
Ou d’éclatants foyers, flammes pyramidales,
Ondoyant sous les vents, reluisaient sur les dalles.


Le navire, voguant sur ces mouvants réseaux,
Comme un aigle au milieu de cent mâts de vaisseaux,
Craignait à chaque instant de déchirer sa quille
Contre une pyramide, une tour, une aiguille.
A travers ce dédale il dirigeait son vol,
Aux mille cris d’effroi qui s’élevaient du sol,
Vers le centre éclatant des dieux, forte demeure,
Qui dominait de haut la ville inférieure.
Là, planant de plus bas sur le sacré séjour
Où les chefs s’enfermaient dans leur jalouse cour,
Ils virent, aux clartés de cent torches errantes,
Dans un jardin coupé de sources murmurantes,