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Ainsi bouillait l’esprit de Lakmi, d’Asrafiel.
Tel quand un rayon d’or vient à tomber du ciel
Sous la muette nuit de ces cachots funèbres
Où l’œil habitué se plaît dans les ténèbres,
Perçant la profondeur de ces voiles épais,
Le jour de cette nuit trouble la morne paix ;
Il montre sur les murs, comme une sombre lampe,
Le poison qui suinte et le scorpion qui rampe ;
Le coupable au cachot, qui sèche de terreur,
Regrette que le jour lui montre son horreur !
Ainsi ces deux enfants de beauté primitive
Étonnaient cet égout de leur splendeur naïve,
Et dans ce monde infect leur apparition
Troublait dans son repos l’abomination.

Lakmi, dont cette image embrasait la pensée ;
Flamme vive et légère à tous les vents versée,
Sans attendre un moment, sans craindre, sans prévoir,
N’avait plus qu’une idée au fond du cœur : revoir !
Revoir l’être inconnu dont le brillant fantôme
L’attirait, comme à soi l’astre attire l’atome ;
Nemphed aurait placé la mort entre elle et lui,
Qu’elle eût couru plus vite où ce front avait lui.
Son sexe de la femme avait l’imprévoyance,
Son âge de l’enfant avait l’impatience ;
Rien n’avait combattu dans son âme un désir ;
Sa main n’avait qu’un geste : aspirer et saisir…
S’approchant doucement de son maître farouche,
Dont les bras découverts pendaient hors de sa couche ;