Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/350

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Elle arracha du doigt du tyran endormi
L’anneau, signe sacré que connaissait Lakmi,
Et que pour accomplir ses volontés sinistres
Elle faisait briller à l’œil de ses ministres.
Ce talisman suprême enfermé dans sa main,
Des cachots du palais elle prend le chemin :
D’une torche enflammée elle éclaire sa route,
De degré en degré descend de voûte en voûte,
Glisse sous les arceaux comme un songe léger,
En laissant sur les murs son ombre voltiger ;
Sous le dédale obscur d’immenses avenues
S’enfonce à pas muets dans des routes connues ;
Terrasse, en leur montrant le signe révéré,
Les eunuques, gardiens de ce cachot sacré ;
Aux bourreaux étonnés défend avec mystère
D’accomplir sur Cédar leur affreux ministère ;
Les écarte du geste, et, tremblant de respect,
Pour la première fois se trouble à son aspect !

Le cachot de Cédar était dans les entrailles
Des remparts du palais, gigantesques murailles
Qui défendaient des dieux les sacrés monuments.
Leurs mains avaient voûté ces massifs fondements
Pour cacher aux regards, dans les flancs de la terre,
L’abomination sous la nuit du mystère.
Sous ces temples géants de granit et d’airain
Régnait dans le silence un monde souterrain,
Monde de l’imposture, où pour la tyrannie
La superstition, exerçant son génie,