Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/392

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Il entr’ouvre du doigt, pour revoir ce visage,
Ces cheveux qui voilaient son front comme un nuage,
Ces cheveux dont l’odeur et dont la pression
D’un duvet d’ailes d’ange offraient l’impression.
« Éveille-toi, dit-il, ô jour de ma paupière ! »
Et découvrant le front sous un regard de pierre,
Mesurant d’un seul trait l’artifice et l’erreur,
Il l’écarte d’un geste et se dresse d’horreur.

Palpitante d’effroi, Lakmi de son bras roule ;
Sa main s’attache en vain au pied qui la refoule.
Cédar, la secouant comme un pasteur blessé,
Rejette le serpent à sa jambe enlacé :
« Exécrable instrument de vice et d’imposture,
Vipère ! criait-il, va ! meurs sur ta piqûre ! »
Et du front qu’il pressait sous son genou nerveux
D’une main indignée arrachant les cheveux :
« Ô voiles de pudeur ! disait-il, chastes ondes !
Avez-vous pu flotter sur ces membres immondes ! »
Et sur le bord à pic poussant toujours Lakmi :
« Va souiller, disait-il, l’enfer qui t’a vomi !… »

La pente, en cet endroit escarpée et profonde,
Dominait de cent pieds le lit grondant de l’onde ;
Un pas de plus, Lakmi se détachait des bords.
Au moment de glisser, elle roidit son corps,
Et, retenant Cédar d’une dernière étreinte,
Des ongles sur sa peau laissant la rude empreinte :