Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/66

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Ces esclaves humains ont plus d’intelligence ;
Ils servent mieux l’amour, le plaisir, la vengeance ;
Et puis l’homme superbe est plus glorifié
De fouler, disent-ils, son pareil sous son pié :
Comparant sa grandeur avec cet esclavage,
Il jouit en secret d’avilir son image. »


En se parlant ainsi, le chasseur approchait
Du corps de Daïdha ; le tronc qui la cachait
En trois pas dépassé lui laissa voir sa proie ;
Son pied qu’il avançait resta levé de joie ;
Il comprit d’un regard le prix de sa beauté.
Flottant entre l’amour et la cupidité,
Il se pencha muet sur sa fraîche figure,
Écarta doucement du doigt sa chevelure,
Et du front dévoilé parcourant les attraits,
D’un sourire infernal il contempla ses traits ;
Puis, frappant ses deux mains en signe de conquête,
Vers sa suite invisible il retourna la tête,
Et l’on vit accourir, au signal triomphant,
Six chasseurs comme lui près du corps de l’enfant.


Debout, l’environnant de leur cercle sauvage,
Ils avançaient le front pour mieux voir son visage ;
Et lui, la main à terre et la tête en avant,
Aux lueurs du flambeau secoué par le vent,
Leur indiquait d’un geste et d’un coup d’œil féroces
Les merveilles d’amour de ces charmes précoces.