Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/69

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L’enfant, sous le réseau dont le tissu ruisselle,
Soulève en vain ses bras pour le secouer d’elle ;
Le lourd voile de fer où se brisent ses doigts
Sur son front écrasé glisse de tout son poids ;
Sur son cou renversé, sur sa pliante épaule,
Parmi ses longs cheveux il se mêle et se colle :
Tel qu’un tissu trempé dans les flots écumants,
De son corps qu’il torture il suit les mouvements ;
La sueur et le sang tachent sa peau meurtrie ;
Elle appelle sa mère, elle pleure, elle crie,
Frappe son front des mains ; mais les mailles de fer
Arrêtent ses cris même et semblent l’étouffer.
Elle cherche à briser, comme avec des tenailles,
Avec ses dents de lait les nœuds sanglants des mailles ;
Mais les mailles en vain dégouttent de son sang.
Pour s’en débarrasser, d’un effort plus puissant
Elle roidit son corps, fléchit, se pelotonne ;
Et, prenant un élan dont le bond les étonne,
Veut en la soulevant dépouiller d’un seul coup
La chemise d’acier qui lui courbe le cou :
Mais plus elle bondit, plus le filet se plisse ;
Dans les plis du réseau son pas hésite et glisse,
Et sous le poids grossi des nœuds multipliés
Tombant près des chasseurs, elle roule à leurs pieds.
À ce jeu dont l’horreur eût fait pleurer les anges,
À ce beau corps froissé sous ses horribles langes,
Un rire d’ironie et de férocité
Éclate en longs échos sous les bois répété.
Au supplice ils joignaient la raillerie amère :
« Belle enfant, disait l’un, appelle donc ta mère !