Et, présentant aux yeux leurs penchants escarpés,
Du soleil tour à tour selon l’heure frappés,
Au mouvement du jour qui chasse l’ombre obscure,
Paraissent ondoyer en vagues de verdure.
Là, l’histoire et la fable ont semé leurs grands noms
Sur des débris sacrés, sur les mers, sur les monts.
Ce sommet, c’est le Pinde ; et ce fleuve est Alphée !
Chaque pierre a son nom, chaque écueil son trophée ;
Chaque flot a sa voix, chaque site a son dieu ;
Une ombre du passé plane sur chaque lieu.
Ces marais sont le Styx, ce gouffre est la Chimère ;
Et, touchés par les pieds de la muse d’Homère,
Ces bords où sont écrits vingt siècles éclatants,
Retentissant encor des pas lointains du temps,
D’un poëme scellé par la gloire et les âges
Semblent, à chaque pas, dérouler d’autres pages.
Le regard, que l’esprit ne peut plus rappeler,
Avec ses souvenirs cherche à les repeupler ;
Et, frappé tour à tour de son deuil, de ses charmes,
Brille de leur éclat ou pleure de leurs larmes.
Tel, si, pendant le cours d’un songe dont l’erreur
Lui rappelle des traits consacrés dans son cœur,
Un fils, le sein gonflé d’une tendresse amère,
Dans un brillant lointain voit l’ombre de sa mère ;
Dévorant du regard ce fantôme chéri,
Il contemple, en pleurant, ce sein qui l’a nourri,
Ces bras qui l’ont porté, ces yeux dont la lumière
Fut le premier flambeau qui guida sa paupière ;
Ces lèvres dont l’accent, si doux à répéter,
Dicta les premiers sons qu’il tenta d’imiter ;
Ce front qu’à ses baisers dérobe un voile sombre :
Et, lui tendant les bras, il n’embrasse qu’une ombre.
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