Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 2.djvu/138

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» Et vous dont le tombeau retentit sous mes pas,
Mânes ensevelis dans un sanglant trépas,
Dans l’éternel bonheur si la pitié vous reste,
Au nom, au nom du Dieu que le martyre atteste,
Éveillez-vous ! parlez !… Du fond du monument,
Que j’entende un seul mot, un soupir seulement !
Un soupir suffirait pour éclaircir mon doute !… »
Et, collant son oreille à la funèbre voûte,
Il semblait écouter un murmure lointain :
Et quand le saint vieillard, au retour du matin,
Vint rallumer la lampe éteinte avec l’aurore,
Le front dans la poussière il écoutait encore !


XL


Mais son regard en vain se soulève au soleil ;
Le jour vient sans chaleur, la nuit vient sans sommeil,
Son front tombe accablé sous le poids des journées,
Et chaque heure en fuyant emporte des années.
Il ne sent point son mal ; mais son mal, c’est la mort.
Voyez-vous dans son lit s’écouler à plein bord
Ce fleuve du désert, ce Nil sacré, dont l’onde
D’un bruit majestueux bat sa rive féconde ?
Comme l’éternité son flot renaît toujours ;
Nul obstacle nouveau ne s’oppose à son cours ;
De la mer qui l’attend son urne est loin encore…
Cependant tout à coup le sable le dévore,
Et, dans son propre lit soudain évanoui,
L’œil en vain le demande ; il n’est plus, il a fui !
Ainsi les jours d’Harold fuyaient, et de sa vie
Dans son sein jeune encor la source s’est tarie ;