Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 2.djvu/147

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Mais du Dieu qui t’aimait l’ineffable clémence
T’accorde une autre épreuve. Écoute, et recommence !
Mais tremble ! car tu vas tirer ton dernier sort.
Au lieu le plus obscur où, sur ces champs de mort,
La nuit semble épaissir ses ombres taciturnes,
L’ange du jugement vient de placer deux urnes
Dont l’uniforme aspect trompe l’œil et la main :
L’une d’elles pourtant renferme dans son sein
L’incorruptible fruit de cet arbre de vie
Qu’aux premiers jours du monde une fatale envie
Fit cueillir avant l’heure à l’homme criminel,
Fruit qui donna la mort, et peut rendre éternel ;
L’autre cache aux regards, dans son ombre profonde,
Celui qui tenta l’homme et qui perdit le monde.
Ce symbole du mal, ce ténébreux serpent
Y roule les replis de son orbe rampant,
Et, noircissant ses bords du venin qui le ronge,
Lance un dard éternel à la main qui s’y plonge…
Avant de te juger, Jéhovah, par ma voix,
T’ordonne de tenter ce redoutable choix ;
Mais il te donne encor, pour guider ta paupière,
Des trois flambeaux divins la céleste lumière.
Marche avec ta raison, ton génie et ta foi ;
Et si tu les éteins, malheur, malheur à toi !
Ta main, plongeant à faux dans l’urne mal choisie,
Puiserait au hasard ou la mort, ou la vie !… »


XLVII


Silence ! Tout se tait. Harold, glacé d’effroi,
Du ciel à ses côtés voit descendre la Foi ;