Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 2.djvu/175

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naissance des peuples, et dont l’histoire ressemble bientôt à la fable. Tout récemment encore, Odyssée, mécontent du gouvernement grec, vient de congédier ses derniers compagnons d’armes, et, seul avec sa femme et ses enfants, il s’est retiré dans une caverne du mont Parnasse, dont il a fortifié l’entrée avec des palissades et du canon. L’ostracisme, comme on le voit, est de tous les siècles : les peuples reprennent leur nom, mais les hommes ne perdent pas leur ingratitude. Il est à désirer que les Grecs n’imitent pas en tout leurs aïeux, et ne souillent pas leur terre régénérée du sang de leurs libérateurs. »


Marco Botzaris. — Digne pendant d’Odyssée, mais plus civilisé que lui. Voici le portrait qu’en donne Pouqueville :


« Melpomène lui avait départi le don de la voix et de la cithare pour chanter le temps où, gardant les troupeaux du polémarque son père, aux bords du Selleïs, il abandonna sa patrie, conquise par Ali-Pacha, pour se réfugier sous les drapeaux français, à l’ombre desquels il crût en sagesse et en valeur. De la taille ordinaire des Souliotes, qui est de cinq pieds environ, sa légèreté était telle, qu’on le comparait au zéphyr. Nul ne l’égalait à la lutte, au jeu du disque ; et quand ses yeux bleus s’animaient, que sa longue chevelure flottait sur ses épaules, et que son front rasé, suivant l’usage antique, reflétait les rayons du soleil, il avait quelque chose de si extraordinaire, qu’on l’aurait pris pour un descendant de ces Pélasges, enfants de Phaéthon, qui civilisèrent l’Épire. Il avait laissé sa femme et deux enfants sur la terre étrangère, pour se livrer avec plus d’audace aux chances des combats. Poëte et guerrier, dans les moments de repos il prenait sa lyre, et redisait aux enfants de la Selleïde les noms des héros leurs aïeux, leurs exploits, leur gloire, et l’obligation où ils étaient de mourir comme eux pour les saintes lois du Christ et de la patrie, objets éternels de la vénération des Grecs. Sa femme Chrysé vint le rejoindre après l’insurrection de la Grèce, et voulut combattre à ses côtés. — Marc Botzaris, en avant de Missolunghi, soutint avec six cents pallikares les efforts de l’armée ottomane tout entière. Les Thermopyles pâliront un jour à ce récit. — Retranchés auprès de Crionero, fontaine