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ET RELIGIEUSES.

Voix qui volez sur les ailes du vent,
Chantres des airs que l’instinct seul éveille,
Joyeux concerts, léger gazouillement,
Plaintes, accords, tendre roucoulement,
Qui chantez-vous pendant que tout sommeille ?

La nuit a-t-elle une oreille
Digne de ce chœur charmant ?
Attendez que l’ombre meure,
Oiseaux ; ne chantez qu’à l’heure
Où l’aube naissante effleure
Les neiges du mont lointain.
Dans l’hymne de la nature,
Seigneur, chaque créature
Forme à son heure, en mesure,
Un son du concert divin ;
Oiseaux, voix céleste et pure,
Soyez le premier murmure
Que Dieu reçoit du matin !


Et moi, sur qui la nuit verse un divin dictame,
Qui sous le poids des jours courbe un front abattu,
Quel instinct de bonheur me réveille ? Ô mon âme,

Pourquoi me réjouis-tu ?


C’est que le ciel s’entr’ouvre ainsi qu’une paupière,
Quand des vapeurs des nuits les regards sont couverts ;
Dans les sentiers de pourpre aux pas du jour ouverts,

Les monts, les flots, les déserts
Ont pressenti la lumière,

Et son astre de flamme, aux bords de sa carrière,
Tourne, et creuse déjà son éclatante ornière

Sur l’horizon roulant des mers.