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AVERTISSEMENT.

« Quant à ce qui regarde, dit-il, la conduite de ce quatrième chant, le pèlerin Harold paraîtra encore moins souvent sur la scène que dans les précédents, et il sera presque entièrement fondu avec l’auteur parlant en son propre nom. Le fait est que je me lassais de tirer, entre Harold et moi, une ligne de séparation que chacun semblait décidé à ne pas apercevoir : c’est ainsi que personne ne voulait croire le Chinois de Goldsmith un Chinois véritable. C’était vainement que je m’imaginais avoir établi une distinction entre le poëte et le pèlerin : le soin même que je prenais de conserver cette distinction, et mon désappointement de la trouver inutile, nuisaient tellement à mon inspiration, que je résolus de l’abandonner, et c’est ce que j’ai fait ici ; les opinions qui se sont formées et qui se formeront encore à ce sujet sont aujourd’hui devenues tout à fait indifférentes. Qu’on juge l’ouvrage et non l’écrivain ! L’auteur qui n’a dans son esprit d’autres ressources que la réputation éphémère ou permanente due à ses premiers succès mérite le sort des auteurs. »

Cette inutile distinction, rejetée par l’auteur anglais, est encore plus complétement effacée dans ce dernier chant du Pèlerinage d’Harold, par M. de Lamartine. Le nom d’Harold est évidemment et toujours employé ici pour celui de lord Byron. Mais parcourons les premiers chants de ce singulier poëme, afin que le lecteur en connaisse mieux la suite.

Harold est un jeune voyageur qui, lassé de bonne heure des voluptés de la vie, quitte sa terre natale, l’Angleterre, et parcourt le monde en chantant ce qu’il voit, ce qu’il sent ou ce qu’il pense : c’est une odyssée pittoresque et morale, une divagation poétique, qui n’a d’autre centre d’intérêt et d’unité que la fiction légère du personnage d’Harold. Au