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Don plus doux que le jour, plus brillant que la flamme,
Air pur, air éternel qui fais respirer l’âme !
Trop souvent les mortels, du ciel même jaloux,
Se ravissent entre eux ce bien commun à tous :
Plus durs que le destin, dans d’indignes entraves,
De ce que Dieu fit libre ils ont fait des esclaves ;
Ils ont de ses saints droits dégradé la raison :
Qu’ai-je dit ? ils ont fait un crime de ton nom !
Mais, semblable à ce feu que le caillou recèle,
Dont l’acier fait jaillir la brûlante étincelle,
Dans les cœurs asservis tu dors ; tu ne meurs pas !
Et quand mille tyrans enchaîneraient tes bras,
Sous le choc de ces fers dont leurs mains t’ont chargée
Tu jaillis tout à coup, et la terre est vengée !


III


Ces temps sont arrivés ! Aux rivages d’Argos
N’entends-tu pas ce cri qui monte sur les flots ?
C’est ton nom ! Il franchit les écueils des Dactyles ;
Il éveille en sursaut l’écho des Thermopyles ;
Du Pinde et de l’Ithome il s’élance à la fois ;
La voix d’un peuple entier n’est qu’une seule voix :
Elle gronde, elle court, elle roule, elle tonne ;
Le sol sacré tressaille à ce bruit qui l’étonne,
Et, rouvrant ses tombeaux, enfante des soldats
Des os de Miltiade et de Léonidas !
N’entends-tu pas siffler sur les flots du Bosphore
Tous ces brûlots armés du feu qui les dévore ;
Qui, sillonnant la nuit l’archipel enflammé,
À travers les écueils dont Mégare est semé,