simples, le berceau de ces deux enfants aux pieds de deux pauvres mères, leurs amours innocents, leur séparation cruelle, ce retour trompé par la mort, ce naufrage et ces deux tombeaux, n’enfermant qu’un seul cœur, sous les bananiers, sont des choses que tout le monde sent et comprend, depuis le palais jusqu’à la cabane du pêcheur. Les poètes cherchent le génie bien loin, tandis qu’il est dans le cœur et que quelques notes bien simples, touchées pieusement et par hasard sur cet instrument monté par Dieu même, suffisent pour faire pleurer tout un siècle, et pour devenir aussi populaires que l’amour et aussi sympathiques que le sentiment. Le sublime lasse, le beau trompe, le pathétique seul est infaillible dans l’art. Celui qui sait attendrir sait tout. Il y a plus de génie dans une larme que dans tous les musées et dans toutes les bibliothèques de l’univers. L’homme est comme l’arbre qu’on secoue pour en faire tomber ses fruits : on n’ébranle jamais l’homme sans qu’il en tombe des pleurs.
Tout le jour la maison fut triste comme s’il était arrivé un événement douloureux dans l’humble famille. On se réunit pour prendre les repas, sans presque se parler. On se sépara. On se retrouva sans sourire. On voyait que Graziella n’avait point le cœur à ce qu’elle faisait en s’occupant dans le jardin ou sur le toit. Elle regardait souvent si le soleil baissait, et, de cette journée, il était visible qu’elle n’attendait que le soir.
Quand le soir fut venu et que nous eûmes repris tous