Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 29.djvu/215

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ma tête était lourde ; mes jambes ne pouvaient me porter. J’étais pâle et défait. Je ne mangeais plus. Le silence m’attristait ; le bruit me faisait mal ; je passais les nuits sans sommeil et les jours couché sur mon lit, sans avoir ni l’envie ni même la force de me lever. Le vieux parent de ma mère, le seul qui pût s’intéresser à moi, était allé passer plusieurs mois à trente lieues de Naples, dans les Abruzzes, où il voulait établir des manufactures. Je demandai un médecin ; il vint, me regarda, me tâta le pouls et me dit que je n’avais aucun mal. La vérité c’est que j’avais un mal auquel sa médecine n’avait pas de remède, un mal d’âme et d’imagination. Il s’en alla. Je ne le revis plus.


IV


Cependant je me sentis si mal le lendemain que je cherchai dans ma mémoire de qui je pourrais attendre quelque secours, et quelque pitié si je venais à ne pas me relever. L’image de la pauvre famille du pêcheur de la Margellina, au milieu de laquelle je vivais encore en souvenir me revint naturellement à l’esprit. J’envoyai un enfant qui me servait chercher Andréa et lui dire que le plus jeune des deux étrangers était malade et demandait à le voir.

Quand l’enfant porta mon message, Andréa était en mer avec Beppino ; la grand-mère était occupée à vendre les poissons sur les quais de Chiaja. Graziella seule était à la maison avec ses petits frères. Elle prit à peine le temps de les confier à une voisine, de se vêtir de ses habits les plus neufs de Procitane, et elle suivit l’enfant,