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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 29.djvu/216

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qui lui montra la rue, le vieux couvent, et la précéda sur l’escalier.

J’entendis frapper doucement à la porte de ma chambre. La porte s’ouvrit comme poussée par une main invisible : j’aperçus Graziella. Elle jeta un cri de pitié en me voyant. Elle fit quelques pas en s’élançant vers mon lit ; puis, se retenant et s’arrêtant debout, les mains entrelacées et pendantes sur son tablier, la tête penchée sur l’épaule gauche dans l’attitude de la Pitié : « Comme il est pâle, se dit-elle tout bas ; et comment si peu de jours ont-ils pu lui changer à ce point le visage ! Et où est l’autre ? » dit-elle en se retournant et en cherchant des yeux mon compagnon ordinaire dans la chambre. — Il est parti, lui dis-je, et je suis seul et inconnu à Naples. — Parti ? dit-elle. En vous laissant seul et malade ainsi ? Il ne vous aimait donc pas ! Ah ! si j’avais été à sa place, je ne serais pas partie, moi ; et pourtant je ne suis pas votre frère, et je ne vous connais que depuis le jour de la tempête ! »


V


Je lui expliquai que je n’étais pas malade quand mon ami m’avait quitté. « Mais comment ? reprit-elle vivement et avec un ton de reproche moitié tendre, moitié calme, « n’avez-vous pas pensé que vous aviez d’autres amis à la Margellina ? Ah ! je le vois, » ajouta-t-elle tristement et en regardant ses manches et le bas de sa robe, « c’est que nous sommes de pauvres gens et que nous vous aurions fait honte en entrant dans cette belle maison. C’est égal, poursuivit-elle en s’essuyant les yeux,