Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 3.djvu/263

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Un jour, c’était aux bords où les mers du Midi
Arrosent l’aloès de leur flot attiédi,
Au pied du mont brûlant dont la cendre féconde
Des doux vallons d’Enna fait le jardin du monde ;
C’était aux premiers jours de mon précoce été,
Quand le cœur porte en soi son immortalité,
Quand nulle feuille encor par l’orage jaunie
N’a tombé sous nos pas de l’arbre de la vie,
Quand chaque battement qui soulève le cœur
Est un immense élan vers un vague bonheur,
Que l’air dans notre sein n’a pas assez de place,
Le jour assez de feux, le ciel assez d’espace,
Et que le cœur, plus fort que ses émotions,
Respire hardiment le vent des passions,
Comme au réveil des flots la voile du navire
Appelle l’ouragan, palpite, et le respire ;
Et je ne connaissais de ce monde enchanté
Que le cœur d’une mère et l’œil d’une beauté,
Et j’aimais ; et l’amour, sans consumer mon âme,
Dans une âme de feu réfléchissait sa flamme,
Comme ce mont brûlant que nous voyions fumer
Embrasait cette mer, mais sans la consumer ;
Et notre amour était beau comme l’espérance,
Long comme l’avenir, pur comme l’innocence.