Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 30.djvu/181

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grand est grand, mais c’est comme le ciel, c’est confus ; et, comme on dit, on n’y voit que des étoiles.

« — Un abrégé de toutes les sciences et de tous les arts, expliqués simplement et nettement, de manière à vous faire connaître tout ce que l’homme a découvert, inventé, imaginé, perfectionné en tout genre d’art et d’industrie, cela serait bon. Cela vous donnerait une idée de vous-mêmes, un respect pour vos facultés, une espérance et un désir d’arriver toujours à mieux, une émulation de siècle à siècle ; et puis cela détruirait beaucoup d’idées fausses que vous avez sur quantité de phénomènes naturels ou artificiels que vous prenez pour sortiléges ?

« — Oui, encore ; mais cela ne plairait qu’aux studieux parmi nous, et nous n’avons guère le temps d’étudier pour étudier. Et puis, quand nous aurions lu cela, que nous resterait-il dans l’âme ? Un nuage de mots, de lignes, de choses, de faits et de machines qui s’embrouilleraient dans l’esprit. Nous avons assez de notre métier, nous n’avons pas besoin de savoir les métiers de chacun.

« — De beaux poëmes comme ceux de Virgile, d’Homère, du Tasse, qui racontent en vers les batailles des héros, les assauts, les incendies de villes, les destructions d’armées, les conquêtes des peuples ?

« — Nous ne lirions pas cela du tout, monsieur. C’était bon du temps des Grecs et des Romains, où les nations ne pensaient qu’à se battre, et où les peuples croyaient à toutes sortes de fables, de dieux, de déesses, de gens descendus du ciel pour se battre avec ceux-ci contre ceux-là. Maintenant le peuple ne croit pas à ces imaginations de poëtes ; il veut que ses poëtes lui chantent du vrai et du bon, ou bien il n’écoute pas.

« — Et de beaux romans où l’on voit des messieurs et des dames qui s’aiment, qui se parlent, qui s’écrivent des