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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 30.djvu/263

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de fois nous soupirâmes sans en dire ni plus ni moins ; et à la fin il releva le bras gauche pour le passer autour de mon corps et m’attirer un peu vers lui, et il m’embrassa en me serrant un peu sur son cœur, et ça fut dit. Il reprit la bête par la bride, marcha sans plus se retourner et sans souffler jusque devant ma porte, me descendit sur le banc de pierre, retourna la tête de son mulet et partit sans s’arrêter ni se retourner. Mais j’avais bien vu qu’il pleurait en dedans, et moi je restai un moment toute seule assise sur le banc de pierre dans l’ombre près de la porte, à pleurer aussi tout bas.


XXXVII


« Quand je n’entendis plus le bruit des fers du mulet sur le pavé, je pris la clef de la maison que j’avais dans la poche de mon tablier, et j’entrai en refermant la porte derrière moi. J’allumai du feu, et j’entrai, ma lampe à la main, dans l’arrière-boutique, où étaient mon armoire et mon lit, pour me déshabiller. Je ne faisais point de bruit en marchant, parce que je croyais que la petite, que la voisine avait dû venir coucher, était déjà endormie, et que je ne voulais plus bavarder ce soir-là, ayant le cœur trop gros.


XXXVIII


« J’entrai donc à pas de loup, sans faire craquer mes souliers ; mais en m’avançant vers le lit, monsieur, je vis deux beaux yeux bien ouverts, qui me regardaient en s’ou-