« Nous n’avons pas d’ouvrage ; » ou bien : « Cette fille n’a pas de papiers ; » ou bien : « Elle a l’air maladif, elle nous resterait sur les bras ; ne la prenons pas, nous avons bien assez de nos enfants et de nos vieux. » La neige et la glace couvraient les chemins.
« À la fin, monsieur, il ne me resta rien que les habits que j’avais sur le corps et qui tombaient déjà de fatigue et de reprises. Mes souliers ne me tenaient plus aux pieds, mes bas laissaient voir mes talons ; j’avais l’apparence d’une de ces vagabondes qui sont entrées dans les prisons ou dans les hospices dans leurs habits d’été, et qui en sortent au mois de décembre avec une robe d’indienne, un chapeau de paille contre le soleil, et des souliers fins, noués par des rubans, pour marcher sur l’herbe ou sur la poussière. Quand je me voyais en passant devant les vitres des fenêtres basses des maisons, je me faisais peur et pitié à moi-même. Je me disais : « Qu’est-ce qui voudra jamais faire asseoir à son feu une pareille mendiante ? »
« Hélas ! monsieur, il a bien fallu le devenir, mendiante. Oui, monsieur, je ne rougis pas de le dire, j’ai tendu la main, pas pour longtemps, par exemple ; mais j’ai tendu la main.
« — Pauvre Geneviève ! m’écriai-je, comment ! vous avez été réduite à frapper aux portes et à demander du pain et un abri pour la nuit, par charité ? Ah ! vous l’avez bien rendue depuis !