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RAPHAËL

meurent la jeunesse et la beauté, dans toute sa sérénité et dans toute sa grâce.

VI

Un tel pays, une telle saison, une telle nature, une telle jeunesse et une telle langueur de toutes choses autour de moi, tout cela était en merveilleuse consonnance avec ma propre langueur et l’accroissait en la charmant. Je me plongeais dans des abîmes de tristesse. Mais cette tristesse était vivante, assez pleine de pensées et d’impressions, pour que je ne désirasse pas m’y soustraire. Maladie sans doute, mais maladie dont le sentiment même est un attrait au lieu d’être une douleur, et où la mort ressemble a un voluptueux évanouissement dans l’infini. J’étais résolu il m’y livrer désormais tout entier, a me séquestrer de toute société qui pouvait m’en distraire, et à m’envelopper de silence, de solitude et de froideur, au milieu du monde que je rencontrerais la ; mon isolement d’esprit était un linceul à travers lequel je ne voulais plus voir les hommes, mais seulement la nature et Dieu.

VII

En passant à Chambéry, j’avais vu mon ami Louis de ***. Je l’avais trouvé dans les dispositions où j’étais moi-même, génie inconnu, âme repliée sur elle-même, corps fatigué par la pensée. Louis m’avait indiqué une maison isolée et tranquille, dans le haut de la ville d’Aix, où l’on recevait les malades en pension.