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RAPHAËL

Il y avait dans l’autre, datée d’un jour après :

« À minuit, le …

» Raphaël ! vos prières m’ont fait descendre une grâce du ciel. J’ai pensé hier à l’arbre de l’adoration, à Saint-Cloud, au pied duquel j’ai vu Dieu à travers votre âme. Mais il y en a un plus divin, l’arbre de la Croix !… Je l’ai embrassé… je ne m’en séparerai plus ! Oh ! qu’on est bien sous ce sang et sous ces larmes qui vous lavent et qui vous embaument !… Hier j’ai appelé un saint prêtre dont Alain m’avait parlé. C’est un vieillard qui sait tout, qui comprend tout, qui pardonne tout !… Je lui ai découvert mon âme, il y a répandu la lumière et la vue de Dieu !… Oh ! qu’il est bon ce Dieu ! qu’il est indulgent ! qu’il est plein de mansuétude ! que nous le connaissions peu ! Il permet que je vous aime ! que vous soyez mon frère ! que je sois votre sœur ici-bas, si je vis ; là-haut, votre ange, si je meurs !… Ô Raphaël ! aimons-le, puisqu’il veut que nous nous aimions comme nous nous aimons !… »

Il y avait au bas une petite croix et comme l’impression d’un baiser tout alentour.

CXLII

Une autre lettre, d’une écriture entièrement altérée et en caractères qui se croisaient et se mêlaient sur la page, comme dans les ténèbres, disait :

« Raphaël ! je veux vous dire encore une parole. Demain je ne le pourrais peut-être plus. Quand je serai morte, ne mourez pas vous-même. J’aurai soin de vous là-haut. Je serai bonne et puissante, comme ce Dieu si bon auquel je