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TOUSSAINT LOUVERTURE.

isaac, avec transport.

Et le pré des Citrons avec la haie autour !…
Et l’église aux flancs gris que surmonte la tour !…
Et sous le noir hangar la chaudière allumée !
Et les dattiers pliants que voile la fumée !…

Il bat ses mains l’une contre l’autre.

Oh ! réjouissons-nous, tout est comme autrefois !

Les deux frères s’embrassent en pleurant.
albert.

Ô mon père !

isaac, criant de toute la force de sa voix, comme pour la porter aussi loin que son regard.

Ô mon père !Ô ma mère ! entendez-vous nos voix ?
C’est Isaac ! c’est moi ! c’est lui qui vous appelle !

toussaint, s’élançant involontairement les bras tendus vers ses enfants.

Me voilà, mes enfant !…

adrienne, arrêtant et lui mettant la main sur la bouche.

Me voilà, mes enfant !…Arrêtez !

toussaint, revenant à lui.

Me voilà, mes enfant !… !Arrêtez !Je chancelle.
Entendre un cri pareil et n’y répondre pas !…

adrienne, lui montrant Salsador qui se rapproche de la scène.

Veillez sur votre cœur et retirez vos pas.

Toussaint rentre poussé par Adrienne dans la cabane.
salvador, aux enfants.

Que regardez-vous donc, enfants, sous le nuage ?
Et pourquoi cachez-vous ces pleurs où votre œil nage ?
Répondez !

isaac.

Répondez !Oh ! monsieur, vous ne voyez donc pas
Ce vallon vert, ce fleuve et ce clocher, là-bas ?

salvador, imitant ironiquement une voix d’enfant.

Une église, un clocher, voyez le beau mystère !
Mais la sottise humaine en a couvert la terre.