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JEANNE D’ARC
ANNÉE 1400 DE J.-C.



L’amour de la patrie est aux peuples ce que l’amour de la vie est aux hommes isolés ; car la patrie est la vie des nations. Aussi cet amour de la patrie a-t-il enfanté, dans tous les temps et dans tous les pays, des miracles d’inspiration, de dévouement et d’héroïsme. Comment en serait-il autrement ? Les actes sont proportionnés à la force du mobile qui les produit. La passion du citoyen pour sa patrie se compose de toutes les passions personnelles ou désintéressées dont Dieu a pétri le cœur humain : amour de soi-même, et défense du droit sacré que tout homme venant en ce monde a d’occuper sa place au soleil sur la terre ; amour de la famille, qui n’est que la patrie rétrécie et serrée autour du cœur de ses fils ; amour du père, de la mère, des aïeux, de tous ceux de qui on a reçu le sang, la tendresse, la langue, les soins, l’héritage matériel ou immatériel, en venant occuper la place qu’ils nous ont préparée autour d’eux ou après eux sous le toit ou dans le champ paternel ; amour de la femme, que notre bras doit protéger dans sa faiblesse ; amour des enfants, en qui nous revivons par la perpétuité du sang, et à qui nous devons laisser, même au prix de notre vie, le sol, le nom, la sûreté, l’indépendance, l’honneur national, qui font la dignité de