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JEANNE D’ARC.

donné au procès quelques formes d’impartialité et de douceur. L’Église jugeait alors, et ne frappait pas de sa propre main. Satisfaite de purger l’hérésie ou le sacrilége par son jugement, elle laissait aux pouvoirs civils l’odieux et l’impopularité de l’exécution. L’inquisition, dans cette cause, paraît avoir été moins avide de condamner Jeanne d’Arc que de la juger. C’était un pouvoir romain. Jeanne, en effet, n’avait offensé que les Anglais, dont l’évêque de Beauvais était le complaisant et le ministre.

L’évêque parla à l’accusée avec mansuétude, comme pour attester une impartialité ou une pitié qui donneraient encore plus d’autorité à l’arrêt. Elle se plaignit d’abord doucement du poids et de la pression des anneaux de fer qui blessaient ses membres. L’évêque lui dit que ces fers étaient une précaution qu’on avait été contraint de prendre pour prévenir ses tentatives réitérées d’évasion. La prisonnière avoua qu’au commencement de sa captivité elle avait naturellement désiré de s’enfuir ; mais qu’il n’y avait en cela ni déloyauté ni crime a elle, puisqu’elle n’avait jamais donné à personne sa foi de ne pas sortir du château. Le procès ne dit pas si on allégea ses fers.

Après cet épisode, on lui fut son acte d’accusation, moins politique que religieux, dans lequel elle était chargée de crimes contre la foi, d’hérésies et de sortiléges.

Interrogée ensuite sur son âge, elle, répondit qu’elle avait dix-neuf ans environ. Sur sa croyance, elle répondit que sa mère lui avait enseigné le Pater, l’Ave et le Credo, les trois prières et la profession de foi des fidèles, et que personne autre que sa mère ne lui avait rien appris de sa religion. On la somma de prononcer à haute voix ces deux prières et cet acte de foi de son enfance : elle craignit apparemment de commettre, en les récitant en latin devant des docteurs, quelque omission ou quelque erreur dont on ferait un texte d’hérésie contre elle. « Je les réci-