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CHRISTOPHE COLOMB.

certaine conséquence logique de peines encourues ou de rémunérations méritées, selon que leur intention a été plus droite ou plus viciée ; mais les grands résultats généraux de ces actes des individus ou des peuples lui appartiennent à elle seule. Elle semble se les réserver indépendamment de nous, pour des fins divines que nous ne connaissons pas, et qu’elle nous laisse seulement entrevoir quand elles sont presque atteintes. Le bien et le mal sont de nous et sont à nous ; mais la Providence se joue de nos perversités comme de nos vertus ; et de ce bien et de ce mal elle tire avec une égale infaillibilité de sagesse l’accomplissement de son dessein sur l’humanité. L’instrument caché, mais divin, de cette Providence, quand elle daigne se servir des hommes pour préparer ou pour accomplir une partie de ses plans, c’est l’inspiration ! L’inspiration est véritablement un mystère humain dont il est difficile de trouver la source dans l’homme même. Elle semble venir de plus haut et de plus loin. Voila pourquoi on lui a donné un nom mystérieux aussi, et qui ne se définit bien dans aucune langue : génie. La Providence fait naître un homme de génie ; le génie est un don : il ne s’acquiert pas par le travail ; il ne s’obtient pas même par la vertu ; il est ou il n’est pas ; sans que celui-la même qui le possède puisse rendre compte de sa nature et de sa possession. A ce génie, la Providence envoie une inspiration. L’inspiration est au génie ce que l’aimant est au métal. Elle l’attire, indépendamment de toute conscience et de toute volonté, vers quelque chose de fatal et d’inconnu, comme le pôle. Le génie suit cette inspiration qui l’entraîne, et un monde moral ou un monde physique est trouvé !

Voila Christophe Colomb et la découverte de l’Amérique !

Colomb, dans sa pensée, aspirait à compléter le globe qui lui paraissait manquer d’une de ses moitiés. C’était