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CHRISTOPHE COLOMB.

le besoin de l’unité géographique terrestre dont il était travaillé. Ce besoin était également une inspiration de son époque. Il y a des idées qui flottent dans l’air comme des miasmes intellectuels, et que des milliers d’hommes semblent respirer en même temps.

Chaque fois que la Providence prépare le monde, à son insu, à quelque transformation religieuse, morale ou politique, on peut observer presque régulièrement ce même phénomène : une aspiration et une tendance plus ou moins complète à l’unité du globe par la conquête, par la langue, par le prosélytisme religieux, par la navigation, par les découvertes géographiques ou par la multiplication des relations des peuples entre eux, au moyen du rapprochement et du contact de ces peuples que des voies de communication, des besoins et des échanges resserrent en un seul peuple. Cette tendance à l’unité du globe à certaines époques est un des faits providentiels les plus visibles dans les résultats de l’histoire.

Ainsi, quand la grande civilisation orientale des Indes et de l’Égypte semble épuisée de vieillesse, et que Dieu veut appeler l’Asie et l’Occident à une civilisation plus jeune, plus mouvante et plus active, Alexandre part, sans savoir pourquoi, des vallées de la Macédoine, entraînant les regards et les auxiliaires de la Grèce, et le monde connu devient un sous la terreur et sous la gloire de son nom, depuis l’Indus jusqu’à l’extrémité de l’Europe.

Quand Dieu veut préparer un auditoire immense au Verbe transformateur du christianisme en Orient et en Occident, il répand la langue, la domination, les armes de Rome et de César des bords du golfe Persique aux montagnes de l’Écosse, unissant sous un seul esprit et sous une seule servitude l’Italie, les Gaules, la Grande-Bretagne, la Sicile, la Grèce, l’Afrique et l’Asie.

Quand il veut, quelques siècles après, arracher l’Arabie,