Aller au contenu

Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 35.djvu/216

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
215
CHRISTOPHE COLOMB.

être plus chers que l’enthousiasme et l’applaudissement de l’Espagne entière, quand le succès eut consacré ses prévisions. Les premiers croyaient sur la foi de ses paroles, les derniers ne croyaient que sur la foi de ses découvertes accomplies.

Le moine, confirmé dans ses impressions par l’épreuve de ses idées sur la science du médecin Fernandez et sur l’expérience du pilote Velasco, se passionna avec eux pour son hôte. Il l’engagea à laisser son enfant à ses soins dans le monastère de la Rabida, à se rendre à la cour pour offrir sa découverte à Ferdinand et à Isabelle, et à solliciter de ces souverains l’assistance nécessaire et l’accomplissement de ses pensées. Le hasard rendait le pauvre moine un introducteur naturel et puissant à la cour d’Espagne. Il l’avait habitée longtemps, il avait eu l’oreille et la conscience d’Isabelle, et, depuis que son goût pour la retraite l’avait éloigné du palais, il avait conservé dés rapports d’amitié avec le confesseur nouveau qu’il avait donné à la reine. Ce confesseur, ministre de la conscience des rois à cette époque, était Fernando de Talavera, supérieur du monastère du Prado, homme de mérite, de crédit et de vertu, devant qui toutes les portes s’ouvraient dans le palais. Juan Pères remit à Colomb une lettre de chaude recommandation pour Fernando de Talavera. Il lui fournit l’équipage convenable pour se présenter décemment à la cour, une mule, un guide, une bourse de sequins, et, l’embrassant sur le seuil du monastère, il le recommanda, lui et son dessein, au Dieu qui inspire et aux hasards qui servent les grandes pensées.

Colomb, pénétré de reconnaissance pour ce première généreux ami qui ne l’abandonna jamais des yeux et du cœur, et à qui il renvoya toujours depuis l’origine de sa fortune, s’achemina vers Cordoue. C’était la résidence actuelle de la cour. Il marchait avec cette confiance dans le