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BOSSUET.

comme on sent la forte charpente sous la majesté et sous les ornements de l’édifice. Il augura que cet orateur serait un politique : il se souvint du cardinal de Richelieu et du cardinal de Mazarin, tyrans ou tuteurs de son enfance. La force de l’un, l’habileté de l’autre, lui parurent revivre, confondues et agrandies, dans ce jeune homme, né comme eux pour le gouvernement d’un empire bien plus que pour la direction d’une communauté ou d’un diocèse. Il le réserva, dans sa pensée, pour son conseil plus que pour sa conscience. Il songea à le préparer par les dignités au maniement de l’Église de France sous sa propre main. C’était alors une des nécessités les plus capitales de son règne.

Tout était faction dans la foi. Le roi méditait de subjuguer toutes ces factions sous le joug de l’Église romaine, et de rester, lui seul dans son royaume, indépendant de cette autorité à laquelle il voulait bien soumettre l’homme, mais non le roi. Il lui fallait pour cela plus qu’un évêque, moins qu’un schismatique, presque un patriarche. Il eut la révélation de cet homme dans Bossuet : il ne se trompait pas.

En rentrant au Louvre, après l’avoir entendu, le roi chargea son secrétaire intime, Rose, d’écrire pour lui au père du prédicateur qu’il venait d’entendre.

Rose écrivit une de ces lettres laconiques, mais mémorables, telles qu’il convient à un roi qui s’abaisse à admirer un sujet. Le roi copia la lettre de sa main. « Un père, disait-il au conseiller du parlement de Metz, doit être glorieux d’avoir un tel fils. »

C’était promettre la faveur et inviter à l’ambition. Le père comprit ; le roi ne tarda pas à justifier ces espérances. Il appela Bossuet à parler en toute occasion devant lui. Nulle parole ne sembla désormais digne de Dieu et du roi, excepté la sienne.

Le père de Bossuet étant venu à Paris pour entendre