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quatrième époque.

Dieu de bonheur, que cette vie est belle !
Ah ! dans mon sein je me sens aujourd’hui
Assez d’amour pour reposer comme elle,
Et de transports pour chanter comme lui !

moi.

          Vois-tu glisser entre deux feuilles
Ce rayon sur la mousse où l’ombre traîne encor,
Qui vient obliquement sur l’herbe que tu cueilles
S’appuyer par le bout comme un grand levier d’or ?
L’étamine des fleurs qu’agite la lumière
Y monte en tournoyant en sphère de poussière ;
L’air y devient visible ; et dans ce clair milieu
On voit tourbillonner des milliers d’étincelles,
D’insectes colorés, d’atomes bleus et d’ailes
Qui nagent en jetant une lueur de Dieu.


          Comme ils gravitent en cadence,
Nouant et dénouant leurs vols harmonieux !
Des mondes de Platon on croirait voir la danse
S’accomplissant au son des musiques des cieux.
L’œil ébloui se perd dans leur foule innombrable ;
Il en faudrait un monde à faire un grain de sable,
Le regard infini pourrait seul les compter :
Chaque parcelle encor s’y poudroie en parcelle.
Ah ! c’est ici le pied de l’éclatante échelle
Que, de l’atome à Dieu, l’infini voit monter.