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sixième époque.

Renversons le rocher ; courons, n’écoutons pas
Ce qui gronde là-haut, ce qui maudit en bas ;
N’entendons pas ces voix mentant à la nature :
L’oracle est, dans le cœur de chaque créature,
L’irrésistible voix qui convie au bonheur ;
C’est mieux que la vertu, l’innocence et l’honneur ;
C’est le cri du ciel même entendu sur la terre :
Aimons-nous, ô ma vie ! Allons dans le mystère
Cacher à l’œil humain d’ineffables amours
Qui n’auront d’autre fin que celle de nos jours.
De notre double vie épuisons les délices ;
Quand la mort dans nos dents vient briser les calices,
Qui sait quel est le sage ou quel est l’insensé,
De celui qui l’a bu tel que Dieu l’a versé,
Ou qui, les refusant à sa soif assouvie,
Au songe de la mort sacrifia sa vie ?
Ce doute existât-il, je voudrais l’encourir.
Une vie avec toi, puis à jamais mourir !
Une vie avec toi, puis l’enfer et ses flammes !
Une vie avec toi, puis la mort à nos âmes !
Car cette horrible vie est un enfer sans toi ;
Le néant éternel y commence pour moi !
Oui, c’en est fait, je fuis, je t’arrache à ce monde ;
Je te rapporte au ciel ........

(On entend la cloche de la chapelle qui sonne l’office du soir
et appelle les jeunes prêtres aux stalles.)

Je te rapporte au cielAirain sacré qui gronde,
Cri d’en haut qui m’appelle aux marches de ma croix,
Ah ! mon cœur égaré se retrouve à ta voix.


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