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elle se partage en divers rameaux qui vont se réunir dans le Navire. Alors on la voit étroite, brillante et pleine de détails magnifiques ; à partir d’η du Navire, elle s’étale de nouveau, et au sud-ouest de la Croix elle enferme un vide très-vaste, ovale, en forme de poire, et d’un noir intense. C’est la plus remarquable de ces plaques sombres de l’hémisphère austral, que les premiers navigateurs ont appelées des sacs à charbon, et qui sont en si grand nombre entre α du Centaure et Antarès. Il s’en faut cependant de beaucoup que cette lacune soit dépourvue de petites étoiles télescopiques ; mais cette teinte noire, si prononcée, résulte du contraste causé par l’éclat intense des parties adjacentes de la Voie lactée ; c’est l’effet du passage brusque de l’obscurité à la lumière. Après ce vide si noir, la Voie lactée reprend sa largeur, qui reste la même jusqu’à ce qu’elle atteigne α du Centaure : là elle forme deux branches qui vont se réunir auprès du Cygne ; mais çà et là des ponts étroits d’étoiles pressées traversent de l’une à l’autre de ces branches. Celle du nord est souvent coupée par des portions lumineuses suivies d’intervalles sombres, qui offrent de nombreuses hachures lumineuses ; puis ce sont des plaques noirâtres entremêlées de riches agglomérations d’étoiles et de vides, dont l’effet ne se peut décrire. Dans le Scorpion et une partie du Sagittaire, la Voie lactée se compose de nuages lumineux à contours définis, qui semblent passer à l’état de groupes stellaires. Les étoiles y sont comme du sable qu’on n’aurait pas étendu avec un crible, mais jeté par poignées ; des intervalles noirs séparent ces agglomérations. Parmi ces étoiles, multipliées avec une profusion si prodigieuse, on en voit de toutes grandeurs, de la 14e jusqu’à la 20e ; puis elles diminuent jusqu’à la nébulosité. Si l’on franchit un certain intervalle, on retrouve la même disposition ; la petitesse des étoiles est inconcevable, et leur multitude déjoue toute tentative de les nombrer. Ce sont des millions de millions, et chacune est un soleil entouré peut-être de mondes qui circulent autour de lui.

» Le courant méridional de la Voie lactée ne s’interrompt pas ; il conserve son éclat, et renferme quelques-uns des groupes les plus splendides du ciel. Un d’eux surtout, situé autour de γ du Sagittaire, se fait distinguer par son étendue et le rapprochement des étoiles qui le composent ; elles sont si nombreuses dans quelques-unes de ses parties qu’il est impossible de les calculer. D’après une évaluation, certainement modérée, leur nombre n’est pas au-dessous de 100,000.

» Deux autres amas s’avancent comme deux promontoires entre