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FIOR D’ALIZA.

pentes escarpées des ruelles d’Aix, qui mènent aux plus hauts plateaux des montagnes, tout en murmurant à demi-voix les versets de son bréviaire.

Le soir, il en redescendait plus ou moins chargé de plantes ou de pauvres papillons épinglés, dont il grossissait sa collection. La seule distraction qu’il se permit après le souper, le chapelet et la prière du soir, était un air de flûte, joué au bord de sa fenêtre donnant sur les prés de Tresserves. Il avait conservé ce goût de musique et cet instrument du temps de sa jeunesse où il avait été fifre dans un régiment du roi de Sardaigne.

Il avait beaucoup d’amitié pour moi, parce que j’aimais a aller, à mes heures perdues, visiter son herbier et entendre les explications scientifiques et providentielles sur la vertu des plantes et sur les mœurs des insectes, toutes attestant, suivant lui, la grandeur et les desseins de la Providence.

Les chuchotements de la maison lui avaient fait connaître la secrète intelligence qui existait entre la jeune Anglaise et moi, les obstacles que sa mère mettait par religion à ce penchant de sa fille, et les difficultés qu’elle apportait a nos entretiens. Il croyait de son devoir de les favoriser de toute sa complicité, pensant ainsi contribuer au salut d’une âme qui serait perdue, si le mariage ne la sauvait pas. Il me proposa d’être ma sentinelle dans la maison de ses sœurs, et de m’avertir, en jouant de la flûte, chaque fois que la mère vigilante sortirait sans sa fille pour la prome-