Où ces beaux fronts de famille,
Penchés sur l’âtre et l’aiguille,
Prolongent leurs soirs preux :
Ô soirs ! ô douces veillées
Dont les images mouillées
Flottent dans l’eau de nos yeux !
Oui, je vous revois tous, et toutes, âmes mortes !
Ô chers essaims groupés aux fenêtres, aux portes !
Les bras tendus vers vous, je crois vous ressaisir,
Comme on croit dans les eaux embrasser des visages
Dont le miroir trompeur réfléchit les images,
Mais glace le baiser aux lèvres du désir.
Toi qui fis la mémoire, est-ce pour qu’on oublie ?…
Non, c’est pour rendre au temps à la fin tous ses jours,
Pour faire confluer, là-bas, en un seul cours,
Le passé, l’avenir, ces deux moitiés de vie
Dont l’une dit jamais et l’autre dit toujours.
Ce passé, doux Éden dont notre âme est sortie,
De notre éternité ne fait-il pas partie ?
Où le temps a cessé tout n’est-il pas présent ?
Dans l’immuable sein qui contiendra nos âmes
Ne rejoindrons-nous pas tout ce que nous aimâmes
Au foyer qui n’a plus d’absent ?
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