Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 5.djvu/275

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ers sinistres de Saint-Saba ; il faut avoir écouté, l’oreille à terre, filtrer goutte à goutte la fontaine unique et aride de Siloé, dans le ravin de Jérusalem, J’ai rêvé mentalement tout cela en écrivant le cantique sur David : je sais par cœur ses plus admirables psaumes, je prie avec ses versets, je chante et je pleure intérieurement aux sons de sa harpe. Job, Homère, David, sont les trois poètes de ma prédilection. On ne descend pas plus profondément dans l’abîme de la destinée que Job, on ne retrace pas plus pathétiquement la nature humaine qu’Homère, on ne gémit pas plus douloureusement que David. Les poètes qui les ont suivis ont été des artistes : ceux-là sont des hommes, plus que des hommes ; des géants de l’expression ! Quand on les a lus, on n’a qu’à se taire.


VII

Voici l’origine de ce vingt-quatrième recueillement, intitulé Utopie.

Il y avait à Mâcon un jeune médecin né à Dijon, nommé Bouchard, une de ces natures studieuses, sérieuses, silencieuses, recueillies en elles-mêmes, qui ne montrent rien au dehors, qui se contentent, comme l’écrin, de contenir des choses exquises, et qui ne se révèlent ce qu’elles sont qu’involontairement et par hasard. Exclusivement occupé de sa profession, savant et charitable, M. Bouchard se répandait peu ; je ne le connaissais que de vue. Je ne soupçonnais pas en lui un émule en poé