Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/170

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vertes de la plus riche végétation ; les mûriers à soie sont plantés partout, et élevés d’étage en étage sur des terrasses artificielles ; les caroubiers à la sombre verdure et au dôme majestueux, les figuiers, les platanes, les orangers, les grenadiers, et une quantité d’autres arbres ou arbustes étrangers à nos climats, étendent sur toutes les parties du rivage voisines de la mer le voile harmonieux de leurs divers feuillages ; plus loin, sur les premières pentes des montagnes, les forêts d’oliviers touchent le paysage de leur verdure grise et cendrée : à une lieue environ de la ville, les hautes montagnes des chaînes du Liban commencent à se dresser ; elles y ouvrent leurs gorges profondes, où l’œil se perd dans les ténèbres du lointain ; elles y versent leurs larges torrents, devenus des fleuves ; elles y prennent des directions diverses, les unes du côté de Tyr et de Sidon, les autres vers Tripoli et Latakieh ; et leurs sommets inégaux, perdus dans les nuages ou blanchis par la répercussion du soleil, ressemblent à nos Alpes couvertes de neiges éternelles.

Le quai de Bayruth, que la vague lave sans cesse et couvre quelquefois d’écume, était peuplé d’une foule d’Arabes, dans toute la splendeur de leurs costumes éclatants et de leurs armes. On y voyait un mouvement aussi actif que sur le quai de nos grandes villes maritimes ; plusieurs navires européens étaient mouillés près de nous dans la rade, et les chaloupes, chargées des marchandises de Damas et de Bagdad, allaient et venaient sans cesse de la rive aux vaisseaux ; les maisons de la ville s’élevaient confusément groupées, les toits des unes servant de terrasses aux autres. Ces maisons à toits plats, et quelques-unes à balus-