Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/355

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’arracher de cette place où l’on vient de s’asseoir tout à l’heure avec indifférence, tant le beau est la lumière de l’esprit et l’invincible attrait du cœur.

Son costume oriental ajoutait encore aux charmes de sa personne : ses longs cheveux, d’un blond foncé et légèrement dorés, étaient nattés sur sa tête en mille tresses qui retombaient des deux côtés sur ses épaules nues ; un confus mélange de perles, de sequins d’or enfilés, de fleurs blanches et de fleurs rouges, était répandu sur ses cheveux, comme si une main pleine de ce qu’elle aurait puisé dans un écrin s’était ouverte au hasard sur cette tête, et y avait laissé tomber sans choix cette pluie de fleurs et de bijoux. Tout lui allait bien : rien ne peut déparer une tête de quinze ans. Sa poitrine était découverte, selon la coutume des femmes d’Arabie ; une tunique de mousseline brodée de fleurs d’argent était nouée par un châle autour de sa ceinture ; ses bras étaient passés dans les manches flottantes et ouvertes jusqu’au coude d’une veste de drap vert, dont les deux basques pendaient librement sur les hanches ; de larges pantalons à mille plis complétaient ce costume ; et ses jambes nues étaient embrassées au-dessus de la cheville du pied par deux bracelets d’argent ciselé. L’un de ces bracelets était orné de petits grelots d’argent, dont le bruit accompagnait le mouvement de ses pieds. Aucun poëte n’a jamais dépeint une si ravissante apparition. L’Aïdé de lord Byron, dans Don Juan, a quelque chose de mademoiselle Malagamba ; mais elle est loin encore de cette perfection de grâce, d’innocence, de douce confusion, de voluptueuse langueur et d’éclatante sérénité, qui se confondent dans ces traits encore enfantins. Je la grave dans mon souvenir pour la peindre