Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/373

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lementâmes ; et le scheik avec ses principaux cavaliers nous escortèrent eux-mêmes jusqu’à la brèche, en donnant ordre aux Arabes de l’intérieur de nous respecter, et de nous laisser examiner les monuments. Je jugeai prudent néanmoins de ne laisser entrer avec nous qu’une partie de mon monde ; le reste demeura campé à une portée de fusil du tertre, prêt à venir à notre secours si nous fussions tombés dans une embûche. Cette précaution n’était pas inutile, car nous trouvâmes dans l’intérieur des murs une population de deux à trois cents Arabes Bédouins, y compris les femmes et les enfants. Il n’y a qu’une issue pour sortir de ces ruines, et nous aurions été facilement pris et égorgés, si ces barbares n’eussent été tenus en respect par la force qui nous restait dehors, et qu’ils pouvaient supposer plus considérable qu’elle ne l’était réellement : nous avions eu soin de ne pas montrer tout notre monde, et quelques moukres étaient restés exprès en arrière, campés sur un mamelon où l’on pouvait les apercevoir.

Aussitôt que nous eûmes franchi la brèche, nous nous trouvâmes dans un dédale de sentiers tournant autour des débris écroulés de la grande muraille et des autres édifices antiques que nous découvrions successivement. Ces sentiers ou ces rues n’avaient aucune percée régulière : mais le pied des Arabes, des chameaux et des chèvres, les avait tracés au hasard parmi ces décombres. Les familles de la tribu n’avaient elles-mêmes rien édifié ; elles avaient profité seulement de toutes les cavités que la chute des pierres gigantesques avait formées çà et là, pour s’y abriter, les unes à l’ombre même des fûts des colonnes ou des chapiteaux arrêtés dans leur chute par d’autres débris ; les autres, par un