Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/433

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implore ses miséricordes, et semble un écho anticipé de la poésie évangélique, répétant les douces paroles du Christ avant de les avoir entendues. Prophète ou non, selon qu’il sera considéré par le philosophe ou le chrétien, aucun d’eux ne pourra refuser au poëte-roi une inspiration qui ne fut donnée à aucun autre homme. Lisez de l’Horace ou du Pindare après un psaume ! Pour moi, je ne le peux plus.

J’aurais, moi, humble poëte d’un temps de décadence et de silence, j’aurais, si j’avais vécu à Jérusalem, choisi le lieu de mon séjour et la pierre de mon repos précisément où David choisit le sien à Sion. C’est la plus belle vue de la Judée, et de la Palestine, et de la Galilée. Jérusalem est à gauche avec le temple et ses édifices, sur lesquels le regard du roi ou du poëte pouvait plonger sans en être vu. Devant lui, les jardins fertiles, descendant en pentes mourantes, le pouvaient conduire jusqu’au fond du lit du torrent dont il aimait l’écume et la voix. — Plus bas, la vallée s’ouvre et s’étend ; les figuiers, les grenadiers, les oliviers l’ombragent : c’est sur quelques-uns de ces rochers suspendus sur l’eau courante ; c’est dans quelques-unes de ces grottes sonores, rafraîchies par l’haleine et par le murmure des eaux ; c’est au pied de quelques-uns de ces térébinthes aïeux du térébinthe qui me couvre, que le poëte sacré venait sans doute attendre le souffle qui l’inspirait si mélodieusement. Que ne puis-je l’y retrouver, pour chanter les tristesses de mon cœur et celles du cœur de tous les hommes dans cet âge inquiet, comme il chantait ses espérances dans un âge de jeunesse et de foi ! Mais il n’y a plus de chant dans le cœur de l’homme, les lyres restent muettes, et l’homme passe en silence entre deux abîmes de doute, sans