Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/186

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ture. Je dormais encore lorsque mon guide m’appela pour partir : mes pieds étaient très-enflés, le cœur me manquait, je voulais attendre le lendemain. — Mon conducteur me reprochait ma faiblesse : « Je savais bien, disait-il, que vous étiez trop délicat pour un tel voyage. Je vous l’avais prédit, il est impossible de nous arrêter ici ; si nous y passons la nuit, il faut encore y passer le lendemain ; nos provisions sont épuisées ; nous mourrons de faim dans le désert. — Il vaut mieux renoncer à notre entreprise, et retourner pendant qu’il en est temps encore. »

Ces paroles me ranimèrent, et je partis. Je me traînai avec effort jusqu’à près de minuit ; parvenus à une plaine où le sable s’élevait et s’abaissait en ondulations, nous nous y reposâmes jusqu’au jour. La première clarté nous fit apercevoir au loin deux objets que nous prîmes pour des chameaux. Mon guide effrayé creusa un trou dans le sable pour nous cacher, et nous nous y enterrâmes jusqu’au cou, ne laissant dehors que la tête. Dans cette pénible situation, nous restions les yeux fixés du côté des prétendus chameaux, lorsque vers midi Wardi s’écria : « Dieu soit loué ! ce ne sont que des autruches. » Nous sortîmes tout joyeux de notre tombeau, et, pour la première fois depuis notre départ, je mangeai un peu de galette, et bus une goutte d’eau. Nous restâmes là jusqu’au soir, attendant l’instant de nous remettre en route. Étant alors au milieu des sables, je souffrais moins en marchant. Nous passâmes le jour suivant à dormir. Nous étions vis-à-vis de Palmyre au midi. Le point du jour après la quatrième nuit nous surprit au bord d’une grande rivière nommée El-Rabib, coulant du midi au nord ; mon guide se déshabilla, me porta sur son dos jusqu’à