Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/260

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de la bataille dépend presque toujours d’elle. Placée en face de l’ennemi, entourée de l’élite des guerriers, elle doit les exciter au combat ; l’action principale se passe toujours autour d’elle, et des prodiges de valeur la défendent. Tout serait perdu, si le hatfé tombait au pouvoir de l’ennemi : aussi, pour éviter ce malheur, la moitié de l’armée doit toujours l’environner. Les guerriers se succèdent sur ce point où le combat est le plus vif, et chacun vient demander de l’enthousiasme à ses regards. — Une jeune fille, nommée Arkié, qui réunissait à un haut degré le courage, l’éloquence et la beauté, fut choisie pour le hatfé. L’ennemi prépara aussi le sien, et bientôt après la bataille commença. Les Wahabis se divisèrent en deux corps : le premier et le plus considérable, commandé par Abdallah-el-Hédal, le général en chef, était devant nous ; le second, commandé par Abou-Nocta, devant les Turcs. Le caractère de ceux-ci et leur manière de combattre sont diamétralement opposés à ceux des Bédouins. Le Bédouin, prudent et de sang-froid, commence d’abord avec calme ; puis, s’animant peu à peu, bientôt il devient furieux et irrésistible. Le Turc, au contraire, orgueilleux et suffisant, fond avec impétuosité sur l’ennemi, et croit qu’il n’a qu’à paraître pour vaincre ; il jette ainsi tout son feu dans le premier choc.

Le pacha Ibrahim, voyant les Wahabis attaquer froidement, se crut assez fort pour disperser à lui seul leur armée entière ; mais, avant la fin de la journée, il avait appris à ses dépens à respecter son adversaire : force lui fut de faire replier ses troupes, et de nous laisser tout le poids de l’action.