Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/303

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tures avec un soin extrême, après s’être pourvus d’eau qu’ils placent à portée de la main ; ensuite ils se couchent par terre, la tête couverte de leur machlas, et restent ainsi tout le temps que dure l’ouragan dévastateur.

Ce matin-là, tout fut en tumulte dans le camp, chacun cherchant à pourvoir à la sûreté de son bétail, et se retirant ensuite précipitamment sous sa tente. Nous avions à peine abrité nos belles juments neggdiés, que la tourmente commença. Des rafales furieuses amenaient des nuages d’un sable rouge et brûlant qui tourbillonnait avec impétuosité, et renversait tout ce qui se trouvait sur son passage : s’amoncelant en collines, il enterrait tout ce qui avait la force de lui résister. Si dans ces moments-là quelques parties du corps se trouvent atteintes, la chair s’enflamme comme si un fer chaud l’avait touchée. L’eau qui devait nous rafraîchir était devenue bouillante, et la température de la tente surpassait celle d’un bain turc.

La tempête dura dix heures dans sa plus grande furie, et diminua ensuite graduellement pendant six heures : une heure de plus, et nous étions tous suffoqués. Lorsque nous nous hasardâmes à sortir de nos tentes, un affreux spectacle nous attendait : cinq enfants, deux femmes et un homme, gisaient morts sur un sable encore brûlant, et plusieurs Bédouins avaient le visage noirci et entièrement calciné, comme par la bouche d’une fournaise ardente. Lorsque le vent du simoun atteint un malheureux à la tête, le sang lui coule à flots par la bouche et les narines, son visage se gonfle, devient noir et bientôt il meurt étouffé. Nous remerciâmes le Seigneur de n’avoir pas été nous-