Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/359

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de bonheur, mit pied à terre pour aller baiser l’étrier du roi, qui l’embrassa ; les autres chefs, heureux de le revoir, le pressèrent dans leurs bras ; Amara, son rival dédaigné, paraissait seul mécontent.

Pour faire honneur à son souverain, Antar continua la route à ses côtés, confiant la garde de sa fiancée à dix nègres qui, pendant la nuit, s’endormirent sur leurs chameaux. Ablla, en ayant fait autant dans son haudag, fut alarmée, à son réveil, de se trouver loin du reste de la troupe ; ses cris éveillèrent les nègres, qui s’aperçurent alors que leurs montures avaient changé de route. Pendant qu’ils s’étaient éloignés pour tâcher de retrouver leur chemin, Ablla, descendue de son haudag, se sentit saisir par un cavalier qui l’enleva, et la plaça en croupe derrière lui ; c’était Amara, qui, furieux de la considération qu’on témoignait à son rival, s’était éloigné, et, rencontrant sa cousine seule, avait pris le parti de s’emparer d’elle ; comme elle lui reprochait cette lâcheté, indigne d’un émir : — « J’aime mieux, lui dit-il, vous enlever, que de mourir de chagrin en en vous voyant épouser Antar. » Puis, continuant sa route, il alla chercher un refuge dans une tribu puissante, ennemie de Beni-Abess. Pendant ce temps, les nègres, ayant retrouvé leur route, étaient venus reprendre le haudag, ne se doutant pas qu’Ablla l’avait quitté. Antar, ayant accompagné le roi jusque chez lui, revint au-devant de sa fiancée, qu’à son grand étonnement il ne trouva plus dans son haudag ; ses informations auprès des nègres étant restées sans résultats, il remonta à cheval, et courut à la recherche d’Ablla durant plusieurs jours, se lamentant de sa perte en disant les vers suivants :