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bre et de janvier, n’aurait pas repoussé de nos drapeaux les peuples attirés par nos doctrines. Voilà comment un seul changement, à l’origine de la République, changeait le sort de la Révolution.


XVI

Mais si les mœurs de la France répugnaient encore à la vigueur de cette résolution, et si l’Assemblée craignait que son enfantement de la République fût précoce, il lui restait le troisième parti : proclamer la déchéance temporaire de la royauté pendant dix ans, mettre le roi en réserve et gouverner républicainement, en son nom, jusqu’à l’affermissement incontesté et inébranlable de la constitution. Ce parti sauvait tout, même aux yeux des faibles : le respect pour la royauté, la vie du roi, les jours de la famille royale, le droit du peuple, l’innocence de la Révolution. Il était à la fois ferme et calme, efficace et légitime. C’était la dictature telle que tous les peuples en ont eu l’instinct dans les jours critiques de leur existence. Mais, au lieu de la dictature courte, fugitive, inquiète, ambitieuse d’un seul, c’était la dictature de la nation elle-même se gouvernant par son Assemblée nationale. La nation écartait révérencieusement la royauté pendant dix ans pour faire elle-même l’œuvre supérieure aux forces d’un roi. Cette œuvre faite, les ressentiments éteints, les habitudes prises, les lois en vigueur, les frontières couvertes, le clergé sécularisé, l’aristocratie