porte ! Venez, nous combattrons tout nus comme les Américains.
» Mais attendrons-nous pour renverser les trônes les ordres du bureau de la guerre ? Attendrons-nous le signal de la cour ? Serons-nous commandés par ces mêmes patriciens, ces éternels favoris du despotisme, dans cette guerre contre les aristocrates et les rois ? Non. Marchons tout seuls. Guidons-nous nous-mêmes. Mais quoi ! voilà les orateurs de la guerre qui m’arrêtent ; voilà M. Brissot qui me dit qu’il faut que M. le comte de Narbonne conduise toute cette affaire, qu’il faut marcher sous les ordres de M. le marquis de La Fayette ; que c’est au pouvoir exécutif seul qu’il appartient de mener la nation à la victoire et à la liberté ! Ah ! citoyens, ce mot a rompu tout le charme ! Adieu la victoire et l’indépendance des peuples ! Si les sceptres de l’Europe sont jamais brisés, ce ne sera point par de telles mains ! L’Espagne restera quelque temps encore l’esclave abrutie de la superstition et du royalisme, Léopold continuera d’être le tyran de l’Allemagne et de l’Italie, et nous ne verrons pas de sitôt les Caton et les Cicéron remplacer au conclave le pape et les cardinaux. Je le dis avec franchise, la guerre telle que je la comprends, la guerre telle que je viens de vous la proposer est impraticable. Et si c’est la guerre de la cour, des ministres, des patriciens soi-disant patriotes et des intrigants qu’il faut accepter, ah ! loin de croire à l’affranchissement du monde, je ne crois plus même à votre propre liberté ! Tout ce que nous avons à faire de plus sage, c’est de la défendre contre la perfidie des ennemis intérieurs qui vous bercent de ces héroïques illusions.
» Je me résume donc froidement et tristement. J’ai prouvé que la liberté n’avait pas de plus mortelle ennemie