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XV

Le sang coulait partout. Les clubs embauchaient les régiments. Les motions patriotiques, les dénonciations contre les généraux, les insinuations perfides contre la fidélité des officiers, étaient les ordres du jour que le peuple des villes donnait à l’armée. La terreur était dans l’âme de l’officier, la défiance dans le cœur du soldat. Le plan prémédité des Girondins et des Jacobins réunis était de désorganiser cette force dévouée au roi, en substituant les plébéiens aux nobles dans le commandement des troupes, et de donner ainsi l’armée à la nation. En attendant, ils la donnaient à la sédition et à l’anarchie. Mais ces deux partis, ne trouvant pas encore la désorganisation assez rapide, voulurent résumer en un seul acte la corruption systématique de l’armée, la ruine de toute discipline et le triomphe légal de l’insurrection.

On a vu quelle part le régiment suisse de Châteauvieux avait eue à la fameuse insurrection de Nancy dans les derniers jours de l’Assemblée constituante. Une armée commandée par M. de Bouillé avait été nécessaire pour réprimer la révolte armée de plusieurs régiments, qui menaçait la France d’une tyrannie de la soldatesque. M. de Bouillé, à la tête d’un corps de troupes sorti de Metz et des bataillons de la garde nationale, avait cerné Nancy, et, après un combat acharné aux portes et dans les rues de cette