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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/66

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énergiques furent l’oraison funèbre de l’ancienne armée, et le projet du comité fut adopté.

La discussion sur l’abolition de la peine de mort offrit à Adrien Duport l’occasion de prononcer, en faveur de l’abolition, un de ces discours qui survivent au temps, et qui protestent au nom de la raison et de la philosophie contre l’aveuglement et l’atrocité des législations criminelles. Il démontra, avec la plus profonde logique, que la société, en se réservant l’homicide, le justifiait jusqu’à un certain point dans le meurtrier, et que le moyen le plus efficace de déshonorer le meurtre et de le prévenir était d’en montrer elle-même une sainte horreur. Robespierre, qui devait tout laisser immoler plus tard, demandait qu’on désarmât la société de la peine de mort. Si les préjugés des juristes n’eussent pas prévalu sur les saines doctrines de la philosophie morale, qui peut dire combien de sang eût été épargné à la France ?

Mais ces discussions, renfermées dans l’enceinte du Manége, occupaient bien moins l’attention publique que les controverses passionnées de la presse périodique. Le journalisme, ce Forum universel et quotidien des passions du peuple, s’était ouvert avec la liberté. Tous les esprits ardents s’y étaient précipités ; Mirabeau lui-même avait donné l’exemple en descendant de la tribune. Il écrivait les lettres à ses commettants ou le Courrier de Provence. Camille Desmoulins, jeune homme d’un grand talent, mais d’une raison faible, jetait dans ses feuilles l’agitation fiévreuse de ses pensées. Brissot, Gorsas, Cara, Prudhomme, Fréron, Danton, Fauchet, Condorcet, rédigeaient des journaux démocratiques ; on commençait à y demander l’abolition de la royauté, « le plus grand fléau, disaient les