Page:Lamartine - Méditations poétiques (édition de 1820).djvu/32

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« Glorieux de mon sort, puisqu’il est ton ouvrage,
« J’irai, j’irai par-tout te rendre un même hommage,
« Et d’un égal amour accomplissant ma loi,
« Jusqu’aux bords du néant murmurer : Gloire à toi! —
— « Ni si haut, ni si bas ! simple enfant de la terre,
Mon sort est un problème, et ma fin un mystère;
Je ressemble, Seigneur, au globe de la nuit
Qui, dans la route obscure où ton doigt le conduit,
Réfléchit d'un côté les clartés éternelles,
Et de l'autre est plongé dans les ombres mortelles.
L'homme est le point fatal où les deux infinis
Par la toute-puissance ont été réunis.
A tout autre degré, moins malheureux peut-être,
J'eusse été... Mais je suis ce que je devais être,
J'adore sans la voir ta suprême raison,
Gloire à toi qui m'as fait ! Ce que tu fais est bon !


— « Cependant, accablé sous le poids de ma chaîne,
Du néant au tombeau l'adversité m'entraîne;
Je marche dans la nuit par un chemin mauvais,
Ignorant d'où je viens, incertain où je vais,
Et je rappelle en vain ma jeunesse écoulée,
Comme l'eau du torrent dans sa source troublée.
Gloire à toi ! Le malheur en naissant m'a choisi;
Comme un jouet vivant, ta droite m'a saisi;
J'ai mangé dans les pleurs le pain de ma misère,
Et tu m'as abreuvé des eaux de ta colère.
Gloire à toi ! J'ai crié, tu n'as pas répondu;
J'ai jeté sur la terre un regard confondu.