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LE MANDARIN.

Martial avait apporté un jeu d’échecs pour le mandarin et pour Lefranc ; Didier et lui devaient jouer aux dominos, leur triomphe !

Si quelque Parisien, ami des arts et des lettres, fût passé ce jour-là par l’île de Neuilly, et qu’il eût cherché sur quatre visages, à lui connus, l’imposante sévérité de celui-ci, l’air sombre de celui-là, le crâne dédain de tel autre et la froide réserve du dernier, il eût été bien surpris de ne trouver que l’expression d’une franche et naïve gaieté.

Vers cinq heures l’île était déserte. On s’y promena jusqu’au soir ; puis, quand le moment de partir fut venu, on recommença la collation dans le louable but d’alléger le bateau.

— Embarquons-nous ! dit enfin Martial, le ciel est limpide comme l’eau, et nous allons prendre à la main les étoiles imprudentes qui se mirent dans le fleuve.

Pé-Kaug saisit les rames, et bientôt les rives s’enfuirent loin de la barque avec rapidité.

Martial prit sa guitare et chanta. Le silence et le calme des nuits, qui impressionnent toujours